La principale centrale électrique de La Réunion située au Port-Est n'utilise plus de fioul, mais de la biomasse liquide issue de l'huile de colza. Production solaire, hydroélectrique ou encore éolienne, les centrales de l’île abandonnent peu à peu les énergies fossiles. L’objectif d’ici 2030 : atteindre un mix-énergétique 100% renouvelable. Si la démarche est louable, la réalité reste teintée d’incertitudes.
Alors, le colza, vraie avancée ou fausse bonne idée ?
1. La biomasse liquide, quels avantages ?
■ L’énergie produite est 100% renouvelable
■ Elle améliore la qualité de l’air
■ Elle est complémentaire de l’éolien et du solaire
■ Elle garantit la même capacité de production d’électricité
2. Une production neutre en émissions de CO2 ?
Les 12 moteurs de la centrale thermique qui couvre environ 40% de la production de l’île, permettront une production presque neutre en émission de CO2... Car il faut prendre en compte l’ensemble de la chaîne de production du colza, de sa récolte dans les champs, à son arrivée à La Réunion, en passant par sa transformation.
3. De l’électricité moins chère à produire ?
Le surcoût lié à la production de biomasse liquide à la place du fioul et aux économies d’émissions de CO2 est estimé à 74 millions d’euros en moyenne par an, soit 1 milliard d'euros sur la durée du contrat d'exploitation de la centrale fixée jusqu'à 2036. Une conversion qui induira donc un impact sur les charges du service public de l’énergie. C'est en tout cas ce qui ressort de la délibération de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) portant sur "l’évaluation de la compensation relative au projet d’avenant au contrat d’achat entre la société EDF (centre EDF île de la Réunion) et la société EDF PEI Port Est pour la conversion au bioliquide de l’installation de production d’électricité de Port Est située à la Réunion". Délibération relayé par Reporterre et à laquelle vous pouvez accéder via ce lien. Reporterre avait déjà en octobre 2023 émis des réserves quant à l'utilisation d'agrocarburants pour la production d'énergie dans les Outre-mer et en Corse (La Corse et les Outre-mer vont produire de l’électricité à partir de colza).
4. Les agrocarburants, l’avenir ?
Au Port-Est, l’huile de colza a été préférée aux huiles de palme et de soja pour son faible impact environnemental. Son utilisation éliminera les émissions de souffre et réduira les émissions de poussière dans l’air. Et évitera chaque année l’émission de 500 000 tonnes de CO2.
Mais les agrocarburants déjà utilisés dans le transport sont loin de faire l’unanimité. “Un bilan environnemental négatif et un bilan climatique décevant", écrivait notamment la Cour des comptes dans son rapport de décembre 2021 sur La politique de développement des biocarburants.
Se pose également la question de la dépendance énergétique... Fini les imporations de fioul, certes, mais cela ne règlera pas la dépendance à l’import de biomasse. Quelle est donc l'utilité, à moyen terme, de supprimer une dépendance - certes très polluante - pour en créer une nouvelle ? EDF Réunion ambitionne de pouvoir un jour utiliser de la biomasse issue de produits locaux et d'huiles usagées. Reste à savoir si d'ici là, le colza aura fait ses preuves dans la production d'électricité sur l'île.